Ludification et Voyage

Il y a 10 ans, concevoir une bonne interface utilisateur pour une application de réservation était le saint Graal. Mais aujourd’hui, c’est l’une des attentes principales pour la conception d’applications de qualité. La facilité d’utilisation ne suffit plus. Ces mois passés, je me suis davantage intéressé à la « Ludification ». La définition actuellement la plus répandue est celle de Stephen Detarding et ses collègues, ils définissent la ludification comme « le transfert des mécanismes du jeu à d’autres domaines », comme ceux des centres d’appels, des équipes commerciales ou des applications de formations. Les stratégies de ludification gagnant de plus en plus de place dans le milieu des affaires, elles ont de grandes chances d’être de plus en plus utilisées pour les technologies que nous utilisons au travail et dans la vie de tous les jours.

La ludification a pour but d’augmenter l’engagement des utilisateurs cibles et de créer une impression parfaite de plaisir que nous, designers d’application, cherchons à intégrer à tout prix à nos créations.

Dans le contexte des voyages d’affaires et pour les voyageurs, agents, opérateurs et sous-traitants, nous voulons utiliser la ludification afin de rendre les employés plus productifs, aussi bien pour leur bien-être que pour les besoins de l’entreprise. En clair, nous ne parlons pas de jeu de simulation de voyages. Personne, et nous l’espérons, ne viendra travailler en baskets, serviette de plage à l’épaule et manette de jeu couverte d’autocollants à la main. Nous nous référons à la dynamique des jeux, les émotions qu’elles créent, l’importance de l’histoire et la possibilité d’apprendre et progresser grâce à des épreuves, ainsi que les opportunités de renforcer le travail d’équipe. Bien sûr, c’est déjà ce que nous essayons de faire en concevant des expériences utilisateurs basées sur les recherches et les statistiques pour nos stratégies, et la production de designs d’interface rapides, efficaces et attrayantes pour nos utilisateurs. Cependant, l’expérience utilisateur ne tourne pas seulement autour de ça, surtout lorsque les utilisateurs doivent utiliser nos systèmes au travail. Prenons pour exemple un agent de voyage, nous pourrions réduire le temps de formation grâce à des scénarios de e-learning, ou simplement grâce à l’utilisation de retours clients pour motiver l’employé à s’améliorer. L’augmentation de la motivation des agents améliore la productivité et cela transforme la ludification en stratégie de design des systèmes qu’ils utilisent vraiment intéressante pour l’entreprise. Des entreprises comme Microsoft, Google, Lloyds, TSB et HSBC ajoutent déjà des expériences de ludification à leur « backend » et aux applications qu’ils proposent à leurs clients.

Il existe toute une science cognitive et du comportement autour de la question des jeux vidéos et de pourquoi on les apprécie autant. Il y a de grandes chances pour que vous ayez déjà participé à une expérience de ludification si vous avez déjà utilisé LinkedIn car ce système vous motive grâce à des points gagnés lorsque vous complétez votre profil, et des retours positifs dès que vous commencez une discussion ou laissez des commentaires. En un sens, la pratique est déjà bien implanté dans l’industrie des voyages d’affaires. Les programmes de fidélité des hôtels et pour les grands voyageurs encouragent les voyageurs à récolter des points afin d’obtenir des récompenses. En 2005, j’ai co-dirigé une étude auprès d’un panel chez Merryl Lynch London afin de rassembler l’opinion des voyageurs sur une application de réservation. Durant la session, il a été révélé que les voyageurs avaient tendance à dépenser davantage en choisissant une compagnie aérienne premium plutôt qu’une compagnie low-cost afin d’augmenter leurs points de fidélité. Leur manager a été surpris par cette information, et d’après ce que j’ai compris, cette information allait être transmise au Directeur Général qui avait bloqué les dépenses élevées et inexpliquées. Non seulement cela démontre bien qu’il est important de discuter avec l’utilisateur final plutôt que les managers, mais cela montre aussi que les motivations personnelles peuvent amener l’utilisateur à créer ses propres jeux et méthodes d’utilisation du système que nous fournissons. Les pilotes en qui nous avons confiance passent généralement beaucoup de leurs heures de formation au vol sur des jeux, bien que ce soit un simulateur de vol « sérieux ». Ainsi, il y a toutes les raisons de penser que les éléments de réflexion autour du jeu peuvent augmenter l’engagement et améliorer l’expérience utilisateur grâce à des facteurs temps qui rentabilisent les voyages d’affaires.

D’une certaine manière, le voyage d’affaires devient du networking. Prenons par exemple les voyageurs qui se retrouvent à un certain endroit sans l’avoir choisi, mais parce qu’ils y ont été envoyé pour le travail. Comment pouvons nous conduire l’expérience des systèmes de voyages d’affaires à transformer une obligation en opportunité ou plaisir pour le voyageur ? Combien de grosses entreprises ont des employés qui se rendent dans des bureaux ou départements qui d’ordinaire ne communiqueraient jamais ? Y a t il des intérêts à encourager le networking entre eux, et peut-on réaliser cela en ajoutant des méthodes et mécaniques de jeux dans le processus ? Comment peut-on utiliser des éléments de jeux pour augmenter la productivité tout en donnant un sentiment d’accomplissement et de réussite aux employés ?

En pratique, tout voyage d’affaires est réalisé dans le but de se rendre à une réunion. En définitive, nous voulons nous assurer que le voyageur arrive à cette réunion de la meilleure manière qui soit, mais si le voyage est impatient d’effectuer ce voyage, on peut bien s’attendre à plus de leur part durant la réunion. Construire l’engouement c’est toute l’architecture, la réflexion autour du jeu, dont on a besoin et qui est tout à fait réalisable.

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